Par Julie Brunet. Cahiers de l'IREF, no 13
Prix du meilleur mémoire 2004 (Concentration en études féministes)
Les années 1990, au Québec, voient l'émergence d'un nombre croissant de productions littéraires signées par des immigrantes de tous horizons. Ignorées par la critique littéraire dite " générale " qui, par ailleurs, tend à occulter la question de la sexuation du discours, ces écritures n'ont encore fait l'objet d'aucune lecture au féminin approfondie. À partir de la problématique du rapport au maternel, pivot de l'identité et des écritures féminines, ce mémoire jette les bases d'une réflexion sur la spécificité des écritures de femmes migrantes au Québec qui, elles aussi, sont travaillées par ce rapport, mais autrement. Plutôt que la relation duelle entre mère et fille qui revient de manière récurrente dans les textes des écrivaines dites " pure laine ", les migrantes proposent un modèle de relations féminines " triangulaire " où la figure grand-maternelle occupe une position centrale et jouit, en outre, d'une autorité narrative étonnante. Histoires de grands-mères explore ces liens intergénérationnels féminins inédits et les moyens textuels utilisés pour les représenter dans trois romans de l'exil : La mémoire de l'eau, de Ying Chen (1992), Le bonheur a la queue glissante, d'Abla Farhoud (1998) et La dot de Sara, de Marie-Célie Agnant (2000). À travers cette lecture qui convie les théories de l'écriture au féminin et de l'écriture migrante, se dessine un passage : de la voix filiale à la voix grand-maternelle, les migrantes réinventent l'histoire du sujet féminin.
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